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Digital : quels défis éthiques pour l’entreprise ?

Mardi 21 février, Fouquet’s, Paris. Dans le prestigieux restaurant des Champs Elysées, une centaine de dirigeants d’entreprises, de DSI et de consultants se réunissent pour répondre à une question pour le moins atypique : quel est l’impact du digital sur les valeurs humaines de l’entreprise ? Un débat lancé dans la bonne humeur par Evelyne Thomas et Béchara Raad, PDG d’EI-Technologies.

« Pourquoi parler d’éthique ? »

« Une entreprise, ça sert à faire de l’argent, non ? Pourquoi parler d’éthique ? » A cette question volontairement provocatrice lancée par la présentatrice de « C’est mon choix », Béchara Raad répond sans hésiter : « Parce qu’avant de créer de la valeur, une entreprise doit créer du sens. C’est une personne morale responsable ». Et pour le PDG à l’initiative de ce dîner/débat, si l’on parle beaucoup de la responsabilité sociale et environnementale des entreprises, on omet en revanche de discuter de leur responsabilité en matière de digital. « L’information, c’est le pouvoir. Avant, quelques organisations gouvernementales comme la CIA détenaient les clés de l’information. Aujourd’hui et plus encore demain, avec la baisse des coûts des technologies du digital, des réseaux sociaux et du big data, toutes les entreprises, des constructeurs automobiles aux assureurs ou autres distributeurs, possèderont aussi ce pouvoir. La question est donc de savoir comment vont-elles l’utiliser. Je vous propose justement que l’on discute de ce que nous, chefs d’entreprises et collaborateurs, souhaitons faire du digital pour continuer à créer de la valeur… Tout en contribuant à rendre le monde meilleur ».

« Si votre armée est déprimée, vous perdrez la bataille »

Le micro passe alors à Gérard Ferrera, Président du Groupe Humaneo, un réseau de professionnels qui échangent autour des fondamentaux éthiques d’entreprise tels que le bien-être au travail. C’est d’ailleurs sous ce prisme qu’il voit l’éthique en matière de digital : « Une entreprise est une armée. Si votre armée est déprimée, vous perdrez la bataille. Le numérique apporte de merveilleux outils de productivité, mais il a des revers en termes d’épanouissement au travail : imbrication vie privée/vie professionnelle, virtualisation des échanges, sédentarisation etc. Il me semble donc important que le management ait une vision claire de comment il fait levier sur le numérique pour améliorer les échanges et la productivité, tout en conservant le lien social qui est le ciment de toute entreprise ».

Petit Ours Brun derrière Norman et Cyprien

Les plats défilent dans la grande salle du Fouquet’s, où résonnent à présent des discussions enflammées autour du digital. Evelyne Thomas appelle alors Georges Sanerot, PDG du Groupe Bayard Presse. « En tant qu’éditeur, nous avons très vite été confrontés au défi du numérique. Un exemple, Petit Ours Brun. Avec l’arrivée de YouTube en 2005, nous nous sommes vite rendu compte que des milliers de contenus avaient été illégalement téléchargés sur la plateforme. Après un procès de plusieurs années contre YouTube, nous avons finalement décidé de changer de stratégie et de jouer à fond la carte du digital, considérant ce dernier non plus comme une menace, mais comme une nouvelle frontière à conquérir. Résultat ? Notre chaîne YouTube compte aujourd’hui plus de 250 millions de vues, la plaçant juste derrière celle de Norman et de Cyprien. Comme par miracle, les piratages se sont arrêtés… Mieux encore : nous avons remarqué que loin de cannibaliser nos ventes, Internet a permis de démocratiser encore plus Petit Ours Brun et de doper ses ventes papier ».

Le monde que nous construisons est-il humain ?

Grand écart au dessert puisqu’après Petit Ours Brun, Evelyne Thomas demande au philosophe, Marc Grassin, ce qu’il pense de la question. « Le digital a complètement changé notre rapport au réel. D’un côté, il nous ouvre aux autres à une vitesse jusque-là inégalée, et nous permet d’avoir accès à une source quasi infinie de connaissances. De l’autre, il nous fait entrer dans un monde virtualisé où l’autre perd une partie de son identité, et où le moindre de ses comportements est enregistré et peut-être monnayé. Parce que les entreprises sont au cœur même de cette transformation numérique, elles ont donc la responsabilité du changement pour définir des valeurs garantissant la préservation des libertés individuelles et le mieux-être collectif ».

Et après ?

Il est 23h30 et le dîner/débat tire à sa fin. A Béchara Raad de conclure : « Nous espérons que cette soirée vous a plu, et qu’elle contribuera à lancer le débat dans vos entreprises, mais aussi avec vos clients et partenaires. La transformation numérique est un sujet qui nous passionne chez EI-Technologies et nous sommes fiers de la réaliser chaque jour à vos côtés ».